Drame  - VOSTF

De Sean Baker Avec Willem Dafoe, Macon Blair, Valeria Cott, Brooklynn Prince. États-Unis. 2017.  112min. (13+)


Dans un motel miteux en périphérie de Disney World, une fillette de six ans, laissée à elle-même par sa jeune mère délinquante, passe son été à faire des mauvais coups avec ses amis. Au grand dam du bienveillant gérant de l'établissement, qui en a déjà plein les bras.


À propos de Florida Project, par Pascal Lefebvre, étudiant en cinéma au Collège Montmorency

The Florida Project, est une comédie dramatique américaine réalisé par Sean Baker, avec Brooklynn Prince (formidable talent du haut de ses 7 ans) et Willem Dafoe (chevronné et toujours à la hauteur). Le réalisateur décide qu’après avoir réalisé Tangerine, un film qui raconte l’histoire d’une prostituée qui recherche durant la veille de Noël son amant qui lui a brisé le cœur, il devait garder la tendance de montrer la réalité crue d’une frange de la société américaine. Ce film, avec deux actrices féminines au premier plan, montre sous les yeux d’une enfant de six ans innocente la difficulté de vivre, mais aussi comment s’échapper du réel en s’amusant avec candeur. Les décors visités dans le récit sont des lieux réels, pour lesquels le réalisateur a décidé d’investir. Ainsi, le film se passe dans le cœur d’Orlando, à quelques pas de Disney World. Cette capitale du rêve américain est démontrée avec beaucoup d’ironie.

Ce film traite, et critique durement, le modèle du « rêve américain » à travers la pauvreté, l’enfance et l’ironie. La petite Moonee (Brooklynn Prince) présente bien le côté innocent et enfantin de l’histoire et ainsi, paradoxalement, permet de dédramatiser la réalité. On voit l'histoire selon le point de vue d’une gamine qui permet de se rappeler notre propre enfance et ainsi de pouvoir la comparer à celle de la fillette. Sa mère délinquante représente la pauvreté et la fausse famille parfaite qu’on voit souvent à la télévision et dans les films où certains mythes et idéologies sont mis de l’avant. On observe ici que ça peut même être souvent la jeune fille qui s’occupe de tout et possède une plus grande maturité que sa mère. D’ailleurs, celle qui incarne la mère, l’actrice Bria Vinaite jouait aussi pour la première fois dans ce film. C’est en voyant son profil Instagram que le réalisateur a tout de suite eu l’idée de l’avoir comme actrice. C’est donc un casting hybride avec des acteurs connus et d’autres inconnus qui fonctionnent avec beaucoup de chimie.

Le cinéaste a investi beaucoup sur l’esthétique du film afin d’ironiser la situation. Déjà avec une « upgrade » de son dernier film (qui était filmé entièrement par un téléphone!) ce film présente des images saturées avec des couleurs très contrastantes. Les plans joyeux et colorés sont en antithèse avec la réalité qu’ils racontent. Cela ajoute une atmosphère parfois triste à la situation des démunis aux États-Unis. En plus de plans en contrastes, il y a aussi les acteurs, les lieux de tournage, la caméra qui démontrent une opposition entre la réalité et le rêve américain. L’endroit où se déroule l’histoire, le motel baptisé Magic Kingdom, est un bâtiment délabré, mauve éclatant, ce qui donne l’impression aux enfants d’habiter dans un château. De manière étonnante, tout en étant cohérent avec l’univers peu chargé du film, il n’y a pas de musique sauf à un moment crucial.

Loin d’un constat misérabiliste,il s’agit de montrer avec humour la cruelle et horrible vie d’une partie importante d’Américains. C’est une expérience étonnante. Vous allez donc voir un film qui vous fera peut-être vous souvenir de votre enfance, vous faire sourire, peut-être pleurer et par-dessus tout, aimer la vie.